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Une maison qui ne ressemble à rien...
Une chanson que tante Thérèse chantait
comme si c'était une berçeuse...
Une maison qui ne ressemble à rien…
Une maison de poupées?
Une miniature?
Et pourtant, si riche de souvenirs!
Je reviens du rocher
du côté où le soleil se couche.
Un jardin sauvage, rocailleux
où je peux faire un bouquet
avec les œillets du poète
qui y poussent sans que personne
ne s’en mêle!
Activité mystique tellement
il y a de douce tranquillité
autour de moi!
Oui! Ça existe bien…
De magnifiques petites fleurs
qui poussent comme ça…
par hasard…
parmi les rochers.
Encore aujourd’hui
ce sont mes fleurs favorites.
Et vous avez compris
que ce que je vous raconte
s’est déroulé
il y a bien 65 ans!
Alors les conjugaisons
qui passeront du présent au passé….
Du passé au présent…
Bien faudra faire preuve d’attention
ou encore bien d’inattention
mais sûrement d’indulgence
envers mon écriture!
Alors…C’était dans les habitudes,
la normalité des choses,
que nous devions entrer par la cuisine d’été.
Question de garder le reste de la maison
à l’abri des mouches
et des grosses bottes de grange!
Grand-papa et mon oncle
s’y promenaient en gros bas de laine
tricotés par grand-maman.
C’était chaud et silencieux
tout à la fois…
Grand-maman termine de laver la vaisselle…
…Pas de savon dans l’eau
Juste de l’eau bouillante!
Et quand il y avait des restes de nourriture
dans le bassin,
l’eau servait à abreuver les cochons.
Ce qui explique l’absence de savon!
Sitôt la vaisselle terminée,
car vous comprenez bien
que je l’aidais un peu,
je me dirige vers la cuisine d’hiver,
celle que je préfère.
C’est tranquille, silencieux…
Mystérieux…
Ça sent propre.
Des relents de tabac de pipe…
Un odeur de meubles bien ciré.
Je fais le tour par le petit salon
où les filles de la maison
devaient y recevoir
leur cavalier!
Des photos,
un bégonia aux ailes d’anges
qui court sur le mur,
le plafond…
Il était beau,
Je me rappelle de son parfum…
Oui…
Planté dans une vieille cannisse
de peinture…
Peut-être pour cette raison
qu’il était si beau.
Oh! J’oubliais de dire
qu’il y en avait un aussi
dans la cuisine d’hiver
tout à côté de l’évier
où se trouvait la pompe
pour tirer l’eau!
Pas d’eau courante
dans ces jours-là…
Oui…
Il y avait un abri à l’arrière de la maison
qui nous attendait 2 ou 3 fois pas jour…
Bon…Je reviens à la cuisine d’hiver…
En traînant ma main tout au long du mur
comme il ne s’en fait plus
à moins de payer bien cher,
je m’engage tout doucement
sur les marches en bois foncé,
très lentement,
une marche à la fois,
tout se fait lentement
dans cette maison,
sur les marches donc,
qui monte aux chambres.
Je devrais dire « aux lits »
car il n’y avait pas de chambre
pas de cloison…
Un dortoir!
Je suis sur la dernière marche
…Lève doucement la tête
en essayant de ne pas regarder
ce visage accroché au mur
qui me faisait tellement peur!
Le Visage du Christ…
Ça sent bon les draps bien propre.
Tellement bon!
Des catalognes partout!
Je ne connaissais pas alors ce mot :
« catalognes »…
Toutes les literies étaient d’un blanc immaculé!
A gauche, tout en haut des marches,
la seule chambre.
Où j’y dormais
sur un lit de paille…
C’était bon!
On se callait là où on se déposait…
Comme un nid d’oiseau tiens!
Et pour m’aider à m’endormir,
deux cadres au mur
au-dessus du lit :
« Le ciel
et l’enfer ».
Quelle idée!
Je ne vous décrirai pas ici
ce que je voyais sur celui
qui représentait l’enfer…
Oh que non!
Alors fichons le camp!
Suivez-moi maintenant.
Nous allons dans l’endroit de la maison
que je préfère :
Le grenier!
Une sorte de fébrilité tranquille,
si ça se fait,
l’impression d’entrer dans un autre monde,
m’habite à chaque intrusion
dans cet endroit…
La main sur la poignée,
le cœur palpitant,
j’ouvre très doucement la porte.
Avec respect et curiosité.
J’ai oublié des bouts…
Des bouquets d’achillée suspendus à sécher
pour soulager les fièvres que l’hiver apportera.
Des photos de gens d’une autre époque.
Tout est de couleur sépia…
Un vieux coffre de cèdre (j’imagine…)
avec à l’intérieur
de vieux livres aux pages rognées
de vieilles dentelles… si belles!
Encore des photos…
Des cadres vides…
Une vieille robe oubliée là depuis longtemps…
couleur sépia…
Finalement, je suis un peu déçue.
Je m’attendais à quelque chose de magique
mais ce n’est qu’aujourd’hui que je réalise
que oui la magie y était!
Je cherche …
Tout autour de moi
y a que du vieux bois
une vieille chaise à réparer…
Une odeur de renfermé…
Et puis j’entends!
J’entends la magie que j’espérais!
Au fond du grenier,
de la lumière…
Il y a quelqu’un..
Grand-maman est au métier!
Une couverture de laine
pour réchauffer les corps transis de froid d’hiver
est montée sur le métier.
C’est apaisant que de la voir tisser.
Elle y est sereine, en paix…
Elle me laisse la regarder…
Me glisse quelques regards.
Je me sens bien
debout à ses côtés…
Aucun mot d’échangé.
Une complicité peut-être?
Elle sait qu’un jour ce sera moi
qui serai assise à un métier?
Peut-être…
Le silence…
Que le bruit de la navette
glissant au milieu des fils de chaîne…
Celui du battant tassant les fils…
Les pieds de grand-maman
qui dansaient sur les pédales…
A quoi pense-t-elle dans ces moments
de tranquille solitude?
Elle est là la magie!!!
L’heure du souper arrive.
Grand-maman doit descendre…
Mais par où vous ne pouvez imaginer!
Il y a un autre escalier!
Heureusement que je sais où il mène
car il y fait sombre.
Il faut s’appuyer quelque peu
sur le mur de pierres…
L’escalier est étroit…
les marches sont rapprochées, étroites…
Une très forte odeur de suie…
Car là où nous débouchons
se trouve un vieux foyer.
Un énorme chaudron de fonte
suspendu là où le feu est entretenu
les jours de pain ou de lavage.
Combien d’heures grand-maman
aura passé dans ce réduit!
Il y fait très chaud…
Cuire le pain…
Tremper les draps
dans une eau bouillante,
au-dessus d’un feu de bois
qui devait chauffer été comme hiver!
Et combien de choses encore que j’ignore!
Le sol en pierres…
Pas de couleur dans cette pièce…
Que la couleur des flammes
quand le feu y brûle.
Voilà!
J’ai fait le tour de la maison.
De retour à la cuisine d’été où
dans une année ou deux
apparaîtra une autre personne.
Tante Thérèse…
Et dans la berçante au-côté de la fenêtre
du côté sud…
Ce ne sera plus grand-papa
avec sa pipe éteinte.
Victor aura sa place au même endroit.
Grand-papa et grand-maman
vivront dans la cuisine d’hiver aménagée
pour qu’ils y soient confortables…
….Mais...
Mais voilà une autre histoire
que je raconterai peut-être un jour!
Lisette
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mercredi
7 mars 2018
Il y a bien 60 à 65 ans…
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Commentaires
2KatrineLundi 3 Décembre 2018 à 04:17Wow grand-maman ! Tellement bien imagé.
J'adore lire ceci. Ça me fait te connaitre un peu plus. Je t'aime.Merci de tout coeur ma belle Katrine!
Tu sais c'est tellement facile lorsqu'on écrit avec son coeur
plein de souvenirs!
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Tu as de beaux souvenirs, merci de les partager
J'ai oublié de te remercier pour la chanson que j'ai tant cherché
ah ben...je ne savais pas que tu la cherchais!
et je suis bien heureuse de pouvoir partager mes souvenirs!